La naissance du Printemps – Légende de Wîsahkêcâhk

Publié le dans : La Voie Chamanique

Au commencement, après que le grand déluge eut nettoyé la terre, Wîsahkêcâhk — le métamorphe, le tricheur, l’enseignant— marchait seul sur la nouvelle terre humide.
Il avait aidé les animaux à faire remonter la boue du fond des eaux pour reconstruire la terre, et maintenant la terre s’étendait large et plate, mais froide et silencieuse.
Les arbres étaient nus. Les rivières étaient bloquées dans la glace. Les vents hurlaient à travers le ciel vide. Il n’y avait pas de chaleur, pas de couleur, pas de chants d’oiseaux.
Même Wîsahkêcâhk, qui aimait les jeux d’hiver et la méchanceté dans la neige, a commencé à se sentir lourd de cœur.
Il est allé parler à Kîsikâw Pîsim, le Soleil, et a dit :
« Ô grand-père, pourquoi rayonnes-tu si loin ? Pourquoi n’apportes-tu plus de chaleur à la terre ? »
Kîsikâw Pîsim répondit :
« Ce n’est pas encore le moment, Wîsahkêcâhk. La Terre dort. La réveiller trop tôt causerait du tort. Elle doit rêver son rêve profond jusqu’à ce que l’esprit du printemps renaisse. »
Wîsahkêcâhk, toujours impatient, se dit : Il doit y avoir un autre moyen.
Il se rendit à la haute montagne où Pônî Pîsim, la Lune d’hiver, était assise dans une loge de poils blancs et d’ombres bleues.
« Laissez-moi emprunter votre tambour », demanda Wîsahkêcâhk. « J’aimerais chanter une chanson pour réveiller la terre ».
Mais Pônî Pîsim l’avertit : « Soit prudent. Le tambour est puissant. Si tu frappes trop fort, les esprits de glace se mettront en colère ».
Wîsahkêcâhk a promis, bien que ses promesses dansaient souvent comme les aurores boréales, belles, mais difficiles à tenir.
Alors il prit le tambour et se mit à chanter.
Il a chanté le chant du retour de l’écureuil.
Il a chanté le craquement de la glace sur la rivière.
Il a chanté les bourgeons qui s’ouvraient sur les peupliers.
Il a chanté jusqu’à ce que même l’épinette la plus ancienne commence à frémir.
Et au fond de la neige, le cœur de la Terre s’est remué.
La chaleur commença à monter.
Les rivières à couler.
La neige à fondre.
Les oies revinrent avec des chants dans le ciel.
Mais il avait trop chanté, trop vite. Le tambour craquait. Le tonnerre grondait.
Pônî Pîsim envoya une grande tempête de neige pour recouvrir à nouveau la terre.
Wîsahkêcâhk savait qu’il était allé trop loin.
Il se dirigea donc vers le centre du monde, un endroit que lui seul connaissait, et là, il s’agenouilla, déposant son cœur dans la terre, enveloppé dans le souvenir des chants qu’il avait chantés.
Et de ce don, le premier vrai printemps est né.
Depuis lors, le printemps revient chaque année, non pas seulement à cause de la rotation de la terre, mais à cause du cœur de Wîsahkêcâhk, toujours profondément enfoui, chantant encore les chants de chaleur, de renouveau et d’espoir.

Et c’est pour cela, mes proches, que la fonte des neiges vient avec le tonnerre. Pourquoi les rivières chantent quand elles se libèrent. Pourquoi nous sentons la joie monter en nous lorsque les oies reviennent. Parce que Wîsahkêcâhk chante encore sous nos pieds, rappelant à la terre et aux gens que la vie, même après les hivers les plus froids, trouve toujours le chemin du retour.
Êkosi, voilà l’histoire.
Kanipawit Maskwa

John Gonzalez – Standing Bear Network
Traduction Yvan Cordier – Institut Shan Ming

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